Dès la sortie de Vientiane, le Mékong nous offre ses plus beaux reflets, l’air est doux et nos vélos filent. Tente montée, douche prise, nous sommes seuls dans un champ à observer le coucher de soleil et peu après les étoiles en philosophant. La veille nous avons passé la soirée avec Dominique et Tam autour de succulentes spécialités laotiennes et thaïlandaises. Je ne le savais pas mais le laotien est une langue proche du thaï. Cependant les laos parlent souvent non seulement le laotien mais aussi la langue de leur ethnie. C’est un pays culturellement très diversifié, il existe en effet quatre groupes ethnolinguistiques au Laos : les tai-kadai, les hmong-yao, les sino-tibétains et les austroasiatiques et des dizaines de sous-groupes ethniques différents.
« Nadia j’ai crevé » me crie Corentin. Et là soudainement je me rappelle pourquoi je suis heureuse d’avoir mes pneus marathon plus. Depuis que Buffalo les as revêtu, je ne compte aucune crevaison. En réparant la crevaison on remarque qu’un des rayons du vélo de Corentin est cassé. Un semi-remorque s’arrête et un jeune couple nous propose d’abord de l’eau puis descendent de leur véhicule et aident à la réparation. Le jeune homme finira par embarquer Corentin dans sa voiture en me laissant avec sa compagne. Ils reviendront quelques minutes plus tard avec la roue Ca tiendra jusqu’à Vang Vieng, le temps de remplacer le rayon. Ils nous offrent des fruits avant de repartir. Deux heures plus tard nous nous arrêtons tout poussiéreux devant une maison pour vérifier le chemin. Ni une, ni deux, la propriétaire (Kham) nous propose d’entrer pour nous désaltérer. Dès les premiers jours nous sommes agréablement surpris par l’hospitalité des laos.
« Yihooo » crie Corentin en se jetant dans l’eau pendant que j’admire les imposants rochers qui bordent le lagon et les champs à proximité. A une vingtaine de kilomètres de Vang Vieng, nous sommes seuls dans ce blue lagon numéro 4. Sweet bicycle life, c’est un des avantages du vélo. En repartant le lendemain nous croisons les bus remplis de touristes en quête de sensations fortes et d’alcool (la ville est connue pour ses activités de tubing une sorte de rafting avec des bars le long de la descente).
A chaque boucle des lacets sinueux de la montée, je m’extasie devant la beauté des paysages. On sue mais quel spectacle. On roule à travers des dizaines de charmants hameaux composés de maisons en bois et bambou. Ils agrémentent ces vallées aux milles collines vertes et jaunes parsemés de fuchsia des bougainvilliers. Dehors les locaux discutent au bord des porches, tressent des paniers, tissent des tissus ou travaillent leur potager pendant que les enfants jouent avec les chiots. Je fais la course avec des gamins à vélo qui rentrent de l’école. Les rizières et champs disparaissent peu à peu, le relief s’est rapproché de la route, les villages s’espacent de plus en plus, on croise un dernier village où les habitants rient et boivent à grande gorgée la fameuse « beer lao » avant d’entamer la montée du point culminant de la route vers Luang Prabang.
Le Laos me rappelle la route du Pamir au Tadjikistan: les enfants qui nous sourient et nous saluent à coups de « Hello » et « Sabaidee », les montagnes, les chèvres le long de la route, la poussière, les charmants petits villages, les vues sublimes du relief, les paysans portant les récoltes sur leur dos à pied le long des routes. Il n’est pas anodin que j’y vois des parallèles, le Laos est un tout comme le Tadjikistan, un petit pays peu dense, pauvre, relativement peu industrialisé et composé principalement de paysans et d’un important relief.
Je dois me concentrer pour respirer et maintenir la cadence, j’avance à du 4km/h depuis 2h. Je sens passer chaque mètre de cette montée raide de 12km et par plusieurs endroits non revêtues. L’air commence sérieusement à se rafraichir lorsque j’arrive à un magnifique point de vue. Une maisonnette promet un accès à de l’eau et le sol est plus ou moins plat. Cette route 13 est empruntée par de gros camions « Powerchina » du chantier du futur train entre Kunming (capitale du Yunnan au sud de la Chine) et Vientiane. Ils déplacent toute la poussière à chacun de leur passage. On a vu plus sexy comme endroit de camping mais de toute façon il n’y a guère le choix, la route est à flan de montagne. Corentin me rejoint épuisé : « Dis moi que c’est dur pour toi aussi », je souris: « j’ai décidé de baptiser cette montée : « la montée de la mort ». On dévore tout les deux avec appétit nos brownies achetés à la dernière ville d’importance, Kasi, quelques heures plus tôt en prévision de l’effort.
« Si on calcule l’hypoténuse… mais on veut pas calculer l’angle ? … mais oui mais pour ça on doit calculer l’hypoténuse ». Emmitouflés dans nos sacs de couchage, nous activons nos neurones à la recherche de nos derniers souvenirs des cours de mathématique. Objectif calculer le degré de la pente que nous sommes en train de monter. Autant se rendre à l’évidence, c’est un échec et une grande honte car la réponse, que nous trouvons le lendemain dès les premiers signes de 4G, était en fait très simple et loin de tout nos savants calculs.
« Zurich swiss Bakery » il y a de vrais pains dans cette boulangerie de Luang Prabang, deuxième ville du pays et attraction touristique phare du Laos. Il faut dire que la ville a du charme, bordée par le Mékong, les nombreux bars offrent de très jolies vues sur le fameux fleuve et les jolies maisons de la ville. Face au Mékong, tout en buvant mon verre de vin blanc, je ressens comme un décalage devant tant de luxe, confort et nourriture et produits occidentaux. Le voyage a vélo c’est aussi profiter de ce grand écart entre les moments sur la route, le camping, les locaux, la précarité mais aussi la simplicité avec les hauts-lieux touristiques, l’accès facile, les produits occidentaux et le faste.
« Mais non ! Incroyable ! » s’écrient-on en coeur avant de se serrer dans les bras. Je croise au détour d’une rue, Nicolas, un backpacker que je rencontre par hasard pour la troisième fois du voyage dans un pays différent (Indonésie, Thaïlande et maintenant Laos). Le monde du voyage est décidément très petit. En plein marathon gastronomique (saucisse laotienne, canard au penang curry, poisson au lait de coco, crêpes flambées au lao lao, raviolis fourrés aux crevettes et citronnelle et j’en passe) Corentin et moi convenons de nous retrouver tous plus tard pour célébrer mon anniversaire.
Les laos gérant les pistes nous observent tels des bêtes de foire dans ce bowling où se rassemblent tous les backpackers en quête d’alcool et d’ambiance après minuit. C’est le seul endroit de la ville où l’on vent encore des bières à cette heure ci et contre toute attente c’est ici que je célèbre mon 31ème anniversaire.
A peine une pause de deux jours et déjà des fourmis dans les jambes nous démangent. Il est temps de quitter les sentiers battus, on a eu notre dose de touristes et de pain au chocolat, on repart avec Corentin vers le sud. Prochaine étape Phonsavan.
Hehe 😂 jamais 2 sans 3 ! Re bon annif ! C’est marrant quand vous étiez petits on organisait parfois des fêtes d’anniversaire avec vos amis au bowling de Jette ea. 😜😂Bises les Loulous