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Una Bruja en Bici

Une année en vivant libre à vélo

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Vol 714 pour Sydney


A l’arrière d’une mobylette, une roue de Buffalo dans chaque main, je réalise que je suis à Jakarta, j’ai l’impression d’être dans une BD de Tintin (vol 714 pour Sydney pour les connaisseurs). La ville est immense. Les grattes-ciel et les malls (grands centres commerciaux) illuminent la ville de leurs innombrables écrans dès le coucher du soleil (18h). Les mobylettes se faufilent à toute allure entre les innombrables voitures et camions et les rues remplies de boui-boui qui servent autant de nourriture variée et épicée qu’il est possible de souhaiter. Camelia et Tony m’accueillent comme une membre de leur famille. Un ami de Tony s’est proposé de me déposer au magasin de vélo avec mes deux roues pour que je change mes jantes usées par les kilomètres parcourus et la route du Pamir. Finalement il me fera faire le tour de la ville, m’invitant au passage à manger dans un restaurant familial local (Warung).

En quelques heures je suis au bout de la planète. Trop facile de prendre l’avion sans compter les litres de carbone consommés et les euros écoulés évidemment. Entre deux siestes, je repense à nos adieux de l’hostel. Maxime, un backpacker français en route vers le Népal et moi avions le même avion à 5h du matin pour Dubaï avant de prendre nos correspondances respectives. Nos amis sont restés éveillés avec nous jusqu’à l’attente de notre taxi. Varup a même fait un live youtube avec nous et son énorme communauté de fan indiens (1 million) et en partant on a eu droit a des embrassades déchirantes. Je suis émerveillée de nos aptitudes humaines à créer du lien en un rien de temps. Agréable surprise pour moi c’est une des beautés du voyage que je n’avais pas envisagée aussi intense avant de partir.

Après une soirée arrosée en compagnie de mes hôtes, je découvre la loi de la jungle du trafic de Jakarta avec mon vélo. Mon guide, Dodi, un autre ami de Tony, me fait crapahuter de Taman-mini (une sorte de site reproduisant l’Indonésie, ses îles, ses spécialités et sa nourriture), à un magasin de vélo d’un de ses amis (qui insiste pour nous offrir une soupe de nouilles aux boulettes) et puis au quartier chinois où l’on se délectera d’un plat chinois. Les indonésiens aiment bien manger et mangent à toute heure de la journée. Leur cuisine est très vaste et très diversifiée, il y a tellement de choses que je ne connais pas : des fruits bizarres, des saveurs étranges. Je goûte d’ailleurs de la cervelle de chèvre (vachement bon) et un fruit qui pue mais qui est assez bon aussi le Durian. Je me dis surtout qu’il va vite falloir que je me remette en selle si je ne veux pas prendre 10kg et ne plus pouvoir bouger d’ici.

La douce perspective des plages de sable blanc s’évanouit avec la mauvaise nouvelle que Tony m’apporte : Le bateau ne partira pas pour l’île de Belitung avant peut-être dimanche. On est vendredi ça fait déjà 3 jours que je suis là. Crotte, en décidant d’éviter de prendre l’avion plus qu’il n’en faut je suis un peu coincée en Indonésie et très dépendante des aléas des cargos qui sont bien moins fréquents. Tony et Camelia m’ont déconseillé de faire la route au Sud de Sumatra qui n’est pas sûre. Risque corroboré par plusieurs blogs de cyclistes qui ont pu expérimenter quelques frayeurs sur cette route, après mon accident il y à un peu plus d’une semaine, je pense avoir atteint le quota d’aventure pour le moment. Je décide de changer de plan et prendre un bus afin d’avancer jusqu’à Padang au milieu ouest de l’île de Sumatra.

Seule « Boulé » à bord (Boulé est le nom que donne les indonésiens aux étrangers apparemment car ils se concentraient tous sur un boulevard à Jakarta. Boulé-vard), je me fais autant brinquebalée que les autres voyageurs par ce chauffeur de bus. Tout le monde saute dans l’habitacle à chaque irrégularité de la route, le bus tangue à chaque tournant, et le chauffeur klaxonne toutes les cinq minutes pour prévenir les autres usagers de la route qu’il roule en sens inverse. Je crains le pire pour Buffalo tout nu, probablement enfoui sous milles bagages. Pourtant habituée des voyages en bus un peu limite en Amérique Latine lors de voyages précédents j’en viens même à me demander si ma dernière heure n’est pas arrivée ici en Indonésie. Mais 36h de bus plus tard, dont 1h sur un cargo pour traverser les deux îles (Java où se trouve Jakarta et Sumatra où se trouve Padang) et les deux dernières en mode disco où une musique romantique à fond de balle qu’affectionne particulièrement les indonésiens se joint aux milles couleurs d’une boule à facette au milieu du bus, j’arrive exténuée à Padang avec Buffalo en vie. Ouf !

Les chants de riz (nasi en indonésien) et quelques averses ponctuent mon trajet. Sumatra est une île à la faune et la flore luxuriante. L’Indonésie est un pays très peuplé et ça se voit, il y a des gens et des échoppes partout. Une chose est sûre je ne vais pas mourir de faim ni de soif. Il fait chaud (25°) et humide mais je savoure néanmoins mon retour sur Buffalo et le plaisir de rouler. Les indonésiens me saluent tout le long de la route, dès mes premiers kilomètres un motard me tend une bouteille d’eau et quelques minutes plus tard un deuxième un sac de cacahuètes. Comme en Iran il ne faut un rien pour qu’ils t’accueillent chez eux. Je passe ma première nuit dans une maison d’une famille indonésienne où l’ensemble du village où je fais étape semble entrer comme dans un moulin. La communauté est importante pour les indonésiens (pays à majorité musulmane et particulièrement sur l’île de Sumatra). Comme chez Tony et Camelia le petit déjeuner est composé d’un plat chaud complet (riz, légumes etc.) épicés. Je n’arrive pas vraiment à me faire au petit déjeuner complètement salé en mode repas. Les pains au chocolat et baguettes croustillantes au beurre et confiture me manquent.

44 lacets, je viens de terminer la célèbre route qui s’étend du lac Maningau vers Bukkitinggi où je souhaite m’arrêter pour la nuit. 10 km de montée relativement raide en 44 lacets entre les rizières et les palmiers avec le lac en contrebas. Plusieurs dizaines de singes (macaques cabriers) me tiennent compagnie le long du trajet. Les baignades à la plage attendront l’arrivée de mon amie Chantal que je retrouve à Medan dans le nord-est de l’île dans une semaine mais qu’importe c’est officiel, je suis dépaysée.



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